Etude d'un module ALIMENTATION HT STABILISEE
Projet publié dans la revue Electronique Pratique n°332 de novembre 2008 sous le titre "Module Alimentation Haute Tension Stabilisée"
Souvent reléguée au rang de ‘’pièce rapportée’’, négligée ou mal étudiée par désintérêt de la chose, l’alimentation d’un circuit électronique peut être source de bien des désillusions. L’article qui suit nous rappelle quelques points fondamentaux et propose la réalisation d‘un module HT ‘’passe-partout’’.
Les caractéristiques principales d’une alimentation sont les tension et puissance requises, l’impédance interne, la stabilité en charge variable, la dérive dans le temps et la réjection du bruit.
L’alimentation : la base sur laquelle reposent les circuits
Les données de tension et de courant sont rapidement fixées en fonction du circuit demandeur. L’impédance interne de laquelle dépend la stabilité en charge, la stabilité dans le temps et la réjection du bruit sont souvent des caractéristiques subies par la conception du circuit.
A titre d’exemple : un amplificateur stéréo à tubes de 30 Watts en classe AB2 peut facilement voir son courant varier entre 100 et 400 mA, et la haute tension redressée et filtrée par une self de choc verra sa tension chuter de plusieurs dizaines de volts, surtout si le redressement s‘effectue à l’aide d’une valve redresseuse. C’est donc au moment ou votre amplificateur en a le plus besoin que l’alimentation va s’effondrer !
La résistance interne d’une alimentation représente un défi majeur, d’autant plus complexe que la tension est haute. Tout amateur passionné en a déjà expérimenté les effets tel le ‘’motor boating’’, cette oscillation qui se traduit dans les enceintes par une pulsation lente qui ressemble au bruit d’un moteur de bateau. Cette instabilité est causée principalement par une résistance interne trop haute de l’alimentation.
Notez également que ce phénomène est influencé par un taux de contre-réaction trop important et par la conception de circuits qui descendent trop bas en fréquence.
Notre étude
Régulièrement confrontés aux problèmes décrits ci-dessus, nous avons développé un module stabilisateur de HT sur base du circuit que nous utilisons dans beaucoup de nos réalisations. De dimensions réduites 80 x 40 mm, il s’intègre dans la plupart des réalisations. De plus il permet de se passer de l’encombrante self de filtrage. D’utilisation universelle, il permet la stabilisation de toute tension comprise entre 100 et 600 Vdc.
Le schéma
Le module s’intercale entre le condensateur ballast et la charge (figure 1). Le redressement et les condensateurs électrolytiques sont extérieurs. Seules 4 connexions sont nécessaires : l’entrée et son retour, la sortie et son retour. Les deux retours sont raccordés à la masse – flottante - du module.
La stabilisation de la tension est obtenue au collecteur de Q1. La tension de 10,7 Volts présente aux bornes des deux zener polarise l’émetteur du transistor PNP à 10 volts et un courant stable de 1 mA parcourt la résistance R2 de 10 kΩ. Ce même courant développe aux bornes des résistances R3, R4 & P1 du collecteur une tension bien stable. Cette tension est filtrée par la cellule R5 – C2 et polarise la porte du transistor MOS Q2. La tension de sortie est prise en source de Q2.
A noter que la tension Vce de Q1 peut varier considérablement. En effet, la tension en entrée n’est pas filtrée et peut présenter une ondulation de plusieurs dizaines de volts, de plus cette tension varie en fonction des aléas du secteur et des variations du courant de la charge en sortie.
Les tensions indiquées au schéma sont celles prévues pour une tension d’entrée de 380 à 450 Volts et de sortie réglable entre 300 et 400 Volts.
Comme le module accepte bien d’autres valeurs, voici les prescriptions à suivre pour définir certains composants.
Les valeurs de D1, D2 et R2 sont invariables. Les valeurs des condensateurs ne sont pas critiques pour autant qu’on reste dans les mêmes ordres de grandeur et que les tensions de service soient respectées.
Les composants marqués d’un astérisque peuvent être changés en fonction des besoins.
Tout d’abord, pour assurer un bon fonctionnement de la stabilisation, il est impératif de conserver une tension d’entrée supérieure à la tension de sortie d’une vingtaine de volts au minimum.
La résistance R1 doit imposer un courant de 2 à 3 mA dans les zener.
Les résistances R3 et R4 et le potentiomètre P1 sont calculés pour développer la tension voulue en fonction du courant de 1 mA qui y circule.
Le transistor PNP Q1 est un MPSA92 qui supporte 300 Volts de Vce, il peut être remplacé par un 2N5401 pour autant qu’on ne dépasse pas 150 Volts de Vce.
Le filtre R5-C2 permet une réjection de 70 dB de l’ondulation à 100 Hz, mais la haute tension met une vingtaine de secondes pour s’établir. En remplaçant R5 par une valeur de 1 MΩ, la tension s’établit immédiatement, et la réjection de l’ondulation est encore de 50 dB. Il faut savoir qu’avec une classique self de choc, l’atténuation de l’ondulation résiduelle est de l’ordre de 20 dB, de plus la self ajoute une résistance de plusieurs dizaines d’Ohms à la résistance interne de l’alimentation.
Enfin le transistor Q2 choisi est un 2SK1120 de Toshiba (figure 3). Nous avons opté pour ce dernier, car notre ancien BUZ305 est devenu introuvable. Le boîtier du 2SK1120 est un TO-247 qui présente deux avantages.
La longueur des pattes est de 20 mm (15 mm pour le BUZ305) et la face supérieure et le trou de fixation sont isolés, ce qui élimine la nécessité du canon isolant. Il est possible de le remplacer par un 2SK1489 de 200 Watts de dissipation maximale.
Le module fonctionne à partir d’une tension d’entrée d’une centaine de volts qui peut être portée à 600 Vdc au maximum. Il doit débiter un courant minimal de 20 mA et peut monter sans problème à 1 A à condition de respecter les limites de dissipation du MOS.
La puissance dissipée
Le transistor 2SK1120 est spécifié pour une puissance de 150 Watts à 25°C. Cela signifie que pour pouvoir atteindre cette caractéristique maximale, il est impératif de garder le sabot du transistor à une température inférieure a 25°C ! Le constructeur associe à cette spécification un graphique appelé ‘’Derating’’ qui peut se traduire par ‘’décote’’ (figure 4).
L’utilisation d’un intercalaire isolant introduit une résistance thermique entre le sabot du transistor et le dissipateur.
Le dissipateur présente également une résistance thermique avec l’air ambiant, elle peut être réduite à des valeurs très faibles en utilisant un ventilateur.
Ces résistances thermiques doivent être prises en compte, elles ont pour effet de décaler le graphe vers des valeurs moindres.
Exemple pratique : supposons que le transistor ballast consomme 30 Watts, est isolé par un intercalaire de 0,85°C/W et monté sur un dissipateur de 1°C/W. C’est le dissipateur qui évacue les calories et l’élévation de température sera de 30°C auxquels s’ajoutent les 25°C ambiants, soit 55 °C.
La température du transistor sera encore supérieure de 25,5°C (30 x 0,85) à cause de la résistance thermique de l’intercalaire, soit 80,5°C. Nous sommes dans le bon, puisqu’à 85°C la dissipation maximale permise est encore de 80 Watts.
Différentes configurations de montage
Nous avons prévu trois configurations mécaniques de montage.
La première est le montage sur bloc alu de 40 x 80 x 6 mm avec intercalaire pour intégration dans un châssis fermé. Si le bloc alu est vissé sur le châssis ou un radiateur extérieur, le module pourra dissiper une quarantaine de Watts, ce qui est largement suffisant pour la plupart des applications en audio.
La deuxième possibilité est le montage en externe. A cet effet le module est placé sur une base alu de 84 x 70 x 5 mm à fixer au châssis et protégé par un couvercle de transformateur de type EI84. La dissipation permise est également d’une quarantaine de Watts.
La troisième prévoit la fixation du transistor sans intercalaire. L’isolation électrique se fera entre le bloc alu porté au potentiel HT d’entrée et le dissipateur. L’interface thermique se situe ici entre le bloc alu de 40 x 80 mm qui fait 32 cm² et le dissipateur. La résistance thermique de l’isolant sera de l’ordre de 0,08°C/W. Avec un dissipateur ventilé, il est possible de dissiper 120 Watts, ce qui s’applique surtout pour les alimentations de laboratoire.
Réalisation pratique
Typon à l'échelle 1
L’ensemble des composants critiques est rassemblé sur un petit circuit imprimé de 40 x 60 mm (figure 5, figure 6 & photo 2).
Le montage ne présente pas de difficultés. Les trois diodes 1N4007 sont soudées côté cuivre.
Le transistor ballast est placé sous le circuit et replié de manière à poser le sabot sur le bloc alu (figure 7, photo 3 & photo 4).
Il est possible de tester le circuit sans placer la carte sur le bloc alu à condition de ne pas dissiper de puissance. Il faut juste prévoir une résistance de charge qui fera circuler un courant de 10 mA dans le ballast.
On fera monter la tension d’entrée de préférence à l’aide d’un transformateur variable en surveillant les tensions d’entrée et de sortie. Dès que la consigne fixée par les résistances R3, R4 et P1 est atteinte, la tension de sortie se stabilisera.
Le circuit imprimé est fixé sur le bloc alu (figure 5-1) par deux entretoises M3 F-F de 10 mm maintenues par deux vis M3 à tête conique. Le transistor est isolé par un intercalaire et fixé sur le bloc alu par une vis M3 de 16mm à tête conique.
Avant de placer l’intercalaire, on vérifiera soigneusement l’absence de toute impureté sur le bloc alu. Il est préférable de poncer celui-ci au papier à l’eau d’un grain de 600. L’intercalaire choisi a une épaisseur de 0,17 mm pour une isolation électrique de 2500 Vac !
Le montage sur le bloc EI84 pour utilisation en externe est identique (photo 5).
Utilisation et caractéristiques techniques
Ce module intègre tous les éléments indispensables à la stabilisation et il peut être monté éloigné de la source de tension et de son utilisation. Tous les essais ont été réalisés avec des fils de 50 cm entre le condensateur ballast et le module et de 50 cm entre le module et les charges sans le moindre problème d’instabilité.
La résistance interne propre du module est de l’ordre de 5 Ω à tension d’entrée constante. Cette résistance est néanmoins influencée par la puissance du transformateur. Pour notre test nous utilisons un transformateur de 110 VA, un redressement par pont de diodes et un condensateur tampon de 100 µF. La résistance interne de l’ensemble s’établit alors à 13 Ω.
Lors de l’embarquement du module dans une réalisation, il sera préférable dans un premier temps de protéger le module par un fusible rapide et une résistance d’une centaine d’Ohms afin de s’assurer que le courant débité est bien limité à une valeur acceptable.
En effet, avec une résistance interne aussi faible, tout court-circuit dans la ligne de sortie sera fatal pour le ballast !
La stabilité de la tension de sortie est mesurée en faisant varier la tension d’entrée. Une variation de 330 à 400 Vdc au condensateur tampon, équivalente à une variation secteur de + et – 10 %, produit une variation de 2 Vdc en sortie.
Après stabilisation d’une dizaine de minutes, avec une tension d’entrée constante, la tension de sortie reste dans une fourchette de 0,1%.
Le taux de réjection est le rapport entre la tension d’ondulation d’entrée et celle de sortie. Pour un courant de 200 mA de notre circuit de test, l’ondulation en entrée s’élève à 6 Vac pour 2 mVac en sortie, soit un rapport de 3000 ou 70 dB.
Le tableau des caractéristiques techniques est le reflet des différentes possibilités de tension et courant. Nous n’oublierons pas que les valeurs de tension, de courant et de puissance sont intimement liées par la relation :
(Vin – Vout) x I = P
Conscient des difficultés inhérentes à l’usinage des bases en aluminium, nous tenons à disposition un stock de ceux-ci, propose un kit de montage ou le module monté et testé.
Liste des composants
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Récapitulatif des photos (Haute définition)