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Le Bruit en Audio


Projet publié dans Electronique Pratique n° 326 de avril 2008 sous le titre "Le Bruit en Audio - Normes et Mesure"


NovoTone - La mesure du bruit en audio - Audio noise measurement

Les sources de bruit qui parasitent nos chères chaînes HI-FI peuvent avoir différentes origines.
Les identifier peut se révéler une gageure. Tout appareil audio de qualité publiera dans le tableau des spécifications une donnée qui caractérise le rapport signal / bruit. De quoi s'agit-il ?
Les lignes qui suivent vont démystifier cette mesure et nous apprendre à la caractériser.
C
omme souvent, il existe quantité de normes différentes pour spécifier le facteur de bruit.


Les sources

Les sources possibles de bruit sont multiples. Les principales sont : Le bruit thermique, les ronflements issus du secteur, les rayonnements et parasites extérieurs et les bruits microphoniques. Les étages d'entrée sont plus que les autres exposés à ces différentes sources.

Le bruit thermique
résulte de l'agitation des atomes et molécules qui composent les éléments. Il est proportionnel à la température. Comme la température ambiante se situe environ à 300°C au-dessus du minimum absolu, on en conclut que le bruit thermique est présent partout, à fortiori dans nos étages d'amplification. Le bruit thermique se subdivise en diverses catégories: bruit blanc, bruit flicker, bruit en grenaille, en crénaux, en avalanche - liste non exhaustive. Une simple résistance - composant ‘'passif'' par excellence - génère du bruit. Son amplitude est définie par la formule :



Dans laquelle : kB est la constante de Boltzmann qui vaut 1,38 x 10 -23, T : la température absolue, R la valeur de la résistance et Df la bande passante considérée. En résolvant cette équation, on obtient pour une résistance de 100 kΩ à 27 °C pour une bande passante de 20 kHz une tension de 6 µV efficaces. C'est un bruit aléatoire qui se traduira après amplification par du souffle. Attention: il s'agit ici du bruit minimal donné pour un composant parfait, les résistances bobinées donnent les meilleurs résultats suivies par celles à couche métallique. Les résistances au carbone sont les plus bruyantes. De plus ce bruit augmente si la résistance est soumise à une tension (AC ou DC). Il en va de même pour les jonctions des semi-conducteurs et à fortiori pour les tubes thermoïoniques. Les capacités ne produisent pas de bruit puisqu'il n'y a pas de continuité électrique.


Les ronflements
issus du secteur transitent par l'alimentation. Ils sont la conséquence de retours de masse ou d'un filtrage déficient. Les cas les plus courants sont le positionnement inadéquat du condensateur tampon, le raccordement par des fils trop longs ou de section insuffisante. Un courant de redressement peut facilement atteindre plusieurs ampères en pointe, et développer quelques centaines de millivolts entre deux points d'un châssis. Cette tension, chargée en harmoniques du 100 Hz, est captée par les étages d'entrée et se retrouve dans vos haut-parleurs sous la forme d'un grésillement.
Attention: ... plus la valeur du condensateur tampon est élevée, plus le courant de pointe sera important...
Le filtrage insuffisant se traduit par une ronflette sourde à 100 Hz.
Dans les amplis à tubes, le ronflement peut être généré par le chauffage des filaments. Un ampli stéréo - push-pull de EL34 - nécessite au minimum 6 Ampères sous 6,3 Vac, et ce courant induit dans le câblage des tubes d'entrée une tension de même fréquence qui est à son tour amplifiée ...
La solution pour - réduire - ce phénomène est de torsader les fils afin d'en annuler l'induction.
A proscrire: faire circuler le courant de chauffage par le châssis. L'alimentation des filaments doit être flottante et raccordée en un seul point à la masse ou à une tension positive comme expliqué ci-après.

Une autre influence est thermoïonique entre la cathode et le filament. Si la cathode est polarisée positivement par rapport au filament, il se crée un courant « filament-cathode » et si le courant est alternatif, la cathode se voit modulée par ce même courant qui est à son tour amplifié ... Ici la solution consiste à polariser les filaments à une tension largement supérieure à la cathode afin de créer une barrière électrostatique. C'est la solution utilisée dans les amplificateurs des années 50 et 60. Les données constructeur des tubes spécifient la tension maximale Vkf (180 V pour une ECC83). L'autre solution est d'alimenter les tubes d'entrée en courant continu.
Dans les amplis à tubes également, un ronflement parasite peut être induit par couplage magnétique entre le transformateur d'alimentation et les transformateurs de sortie. Il est impératif d'orienter les tôles du transformateur d'alimentation perpendiculairement aux tôles des transformateurs de sortie.

Les amplis à tubes sont également sensibles au bruit microphonique. Comme les caractéristiques électriques des tubes dépendent de leurs caractéristiques mécaniques, le tube va répercuter dans le signal toute variation mécanique. Il s'agit de craquements dus à dilatation des éléments ou plus simplement de simples chocs sur les tubes d'entrée. La EF86 a été spécialement étudiée pour - réduire - ce type de bruit. Ce phénomène est surtout présent au niveau des étages d'entrée des préamplificateurs RIAA et microphone.

Les parasites extérieurs sont une autre source de pollution. Citons rapidement les parasites secteur générés par les machines, les gradateurs d'éclairage, GSM, ordinateurs, émetteurs radio... Nous ne nous y attarderons pas, car ce type de mesure fait l'objet d'un tout autre domaine : l‘immunité aux parasites.


Le rapport Signal / Bruit

Pour caractériser le bruit d'un amplificateur ou d'un récepteur, les constructeurs publient une spécification nommée le rapport signal / bruit. Par définition, c'est le rapport entre la puissance du signal utile et celle du bruit parasite et s'exprime en dB.




En pratique les spécifications annoncées sont toujours le rapport en tension (signal + bruit) / bruit.
On est estime qu'au-dessus de 50 dB de rapport S/B, le bruit n'est plus gênant à l'audition et est qualifié d'excellent. Toutefois cette mesure cache des non-dits. Il faut considérer la puissance à laquelle cette mesure est faite. Idéalement à 1 W ce qui permet de comparer différents produits. Or bien des constructeurs la publient à la puissance nominale: à 100 W le rapport S/B est supérieur de 20 dB !
Ainsi un ampli annoncé avec un rapport S/B de 70 dB à 100 W fera en pratique 50 dB à un niveau d'écoute normal. Un autre point est que la mesure publiée est ‘'pondérée'', ce qui signifie qu'elle ne prend pas en considération toutes les fréquences du spectre de la même manière. Cette mesure présente un avantage qui peut monter à 20 dB sur la mesure linéaire, car elle atténue fortement les extrémités du spectre audio (figure 2). Si vous optez pour un préamplificateur séparé, son bruit propre s'ajoutera à celui de l'ampli, mais il sera le principal contributeur du bruit final.


La mesure du rapport S/B

Il existe différentes normes qui caractérisent cette mesure. La plus simple est la mesure linéaire. Elle est mesurée directement à l'aide d'un millivoltmètre AC. Idéalement la bande passante est limitée à 20 kHz, ce sont les ‘'dB Lin''. Une autre norme universellement utilisée est la ‘'Pondération A'' qui prend en considération la sensibilité relative de l'oreille aux différentes fréquences et amplitudes reprises dans les courbes de Fletcher. En 1933, H. Fletcher et W.A. Munson dans leur étude : ‘'Loudness, its definition, measurement and calculation'' ont publié les courbes ‘'Equal-loudness contours'' reprises en
figure 1.
Cette mesure est faite au travers d'un filtre assez complexe et s'exprime en ‘'dBA''. Elle donne une image nettement plus avantageuse que la mesure linéaire, en effet elle atténue fortement les basses fréquences et présente un maximum à 2,5 kHz. Elle est normalisée sous l'appellation ANSI A-Weighting Filter.
Il existe une Pondération B et C et ITU-R 468 (International Telecommunication Union - Radio). La pondération B est obsolète. La Pondération C est une courbe plate comprise entre à 31,5 Hz et 8 kHz à -3 dB. La courbe ITU-R 468 est utilisée pour le matériel professionnel comme les centraux téléphoniques et la radio-diffusion (figure 2).


L'amplificateur de mesure

La difficulté dans la mesure du rapport S/B réside dans la mesure du bruit. En effet, les tensions sont souvent inférieures à 1 mVac. Un rapport S/B de 80 dB pour 1 W dans 8 Ω représente une tension de 300 µV.
Il sera nécessaire d'amplifier ce bruit - sans en ajouter - avant de le mesurer.
Ceci nous amène à notre réalisation pratique. Il s'agit d'un amplificateur de mesure qui amplifiera d'abord le signal de 0, 20, 40 ou 60 dB avant de transiter par les filtres. Nous avons prévu les filtres ‘'A-Pondéré'', ‘'Lin 20 kHz'', ‘'Lin 3 kHz'', ‘'Lin 300 Hz'' et "Full" ou ... pas de filtre. Cette réalisation permet de mesurer des signaux aussi faibles que 3 µVac.


Le schéma

Schéma de l'amplificateur de mesure
Le préamplificateur utilise l'AOP OPA604. Le brochage étant normalisé, il est possible d'essayer bien d'autres circuits, mais l'OPA604 donne d'excellents résultats. Le signal en entrée est isolé par une capacité de 47 nF de 1000 Volts en série avec une résistance de 1kΩ.
Il est limité par les deux diodes D1 et D2, ce qui permet de mesurer des signaux AC superposés à des tensions DC conséquentes. L'impédance d'entrée fait 1 MΩ pour une capacité de 50 pF sur toutes les gammes et accepte l'utilisation d'une sonde d'oscilloscope en portant l'impédance d'entrée à 10 MΩ / 6 pF. Un filtre passe haut d'une fréquence de coupure de 50 Hz permet la mesure AC superposée à des tensions DC instables, comme l'ondulation résiduelle d'une alimentation.

Suit ensuite une cascade de trois amplificateurs IC1, 2 et 3 d'un gain exact de 10 fixé par les résistances R9-R11. Le routage du signal est assuré par les relais K1 à K4. Sur la gamme x1, le signal est envoyé directement sur IC4 monté en gain unitaire. Le signal en sortie de cet AOP est redressé et pilote le 741 (IC5) qui bascule quand le signal atteint 2 Vpeak. Ce circuit prévient le dépassement d'un signal de 1 Vac en sortie.
Bien que le signal maximal possible atteigne 6 Vac, nous le spécifions à 1 Vac en garantissant la linéarité jusque 500 kHz. La sortie de IC4 pilote également les différents les filtres. Le filtre ‘'A-pondéré'' est une version simplifiée, mais sa réponse est conforme à +/- 1 dB. Les autres filtres sont réalisés par la mise en cascade de deux filtres du 1er ordre.
Après sélection par le commutateur, le signal est routé vers IC6 configuré en gain unitaire pour les filtres linéaires et avec un gain de 12 dB pour le filtre ‘'A-pondéré''. Le potentiomètre P1 ajuste l'amplitude de ce filtre à 1 kHz pour une valeur égale à celle affichée en "Full". L'impédance de sortie est de 600 Ω.


L'alimentation

Schéma de l'alimentation
Après redressement des 2 x 15 Vac, on obtient une tension de + et - 25 Vdc. Deux régulateurs 7812 et 7912 stabilisent les tensions à + et - 12 Vdc. Pour mesurer des tensions très faibles, il faut impérativement utiliser des batteries. En effet, malgré un luxe de précautions, le ronflement induit et les courants de masse issus du redressement atteignent encore 3 µV reportés en entrée. Le fonctionnement sur batteries permet une amélioration de 20 dB. En fonctionnement secteur, les batteries sont chargées via D2-R1 et D3-R2 par un courant de 7 mA environ. En fonctionnement sur batteries, les secondaires du transfo sont mis hors-service et l'alimentation se fait via les diodes D1 et D4. Les batteries ont une capacité de 250 mAh et une autonomie de 2 heures. La charge complète prend 24 heures.


MISE EN OEUVRE

Attention: vu l'exceptionnelle sensibilité du préamplificateur, il est impératif d'utiliser un boîtier étanche en tôle de fer afin de s'affranchir des parasites électromagnétiques.
Nous avons du boucher les trous d'aération du boîtier et assurer le raccordement à la masse des deux capots. (photo 5 & photo 6).
En fonctionnement "Batteries" sur la gamme x1000, il est préférable de retirer le cordon secteur.


La mécanique

L'amplificateur de mesure est placé dans un boîtier de dimensions 203 x 178 et 65 mm de haut.

La carte est fixée sur deux profilés alu de 10 x 10 x 195 mm. Il est préférable de réaliser la mécanique à l'aide de la carte non-montée (figure 5). La position de la carte est solidaire de l'axe du commutateur ‘'Pondération'' sur la face avant. Ce perçage sur la face avant (figure 6, photo 3) ne nécessite que peu de précision, car la carte est ensuite ajustée sur les profilés et les profilés ajustés au châssis (photo 2). La carte des batteries est fixée sur la face arrière en laissant libre l'emplacement pour le socle secteur et le porte fusible (photo 4).


Les circuits imprimés

NovoTone - La mesure du bruit en audio - Audio noise measurement
Typon à l'échelle 1

La
carte ampli mesure 100 x 160 mm. On placera dans l'ordre : les 20 picots de 1,3 mm, les 4 picots des relais K1 à K4 sont placés côte cuivre et arasés coté composants, les 12 pontages et les 6 supports AOP. Le pontage reliant K5 au ‘'+'' sera isolé. Suivront les composants par ordre de taille en terminant par le commutateur. Les condensateurs C6, 10, 14 et 36 sont soudés sous les AOP côté cuivre, le condensateur C1 est supprimé.
On testera d'abord l'alimentation. La carte non équipée des AOP sera mise sous tension et on vérifiera la présence des + et - 12 Vdc aux broches 4 et 7 de chaque circuit intégré. Ensuite après déchargement de l'alimentation, nous insèrerons les circuits et vérifierons après mise sous tension que chaque sortie en broche 6 est bien à zéro Volt.


NovoTone - La mesure du bruit en audio - Audio noise measurement
Typon à l'échelle 1

La
carte alimentation mesure 159 x 58,5 mm, elle supporte le transformateur, les quatre batteries de 9 V / 250 mA et les quelques éléments de charge (photo 4). On montera dans l'ordre: les 11 picots, les composants axiaux et le transformateur. Chaque batterie est fixée à l'aide de deux serre-câbles. Nous testerons la carte avant toute mise en service afin de s'assurer que les batteries sont bien configurées. La tension entre la masse située au point central des secondaires et le point X doit être de +18 Vdc et - 18 Vdc au point Y.

Au montage final, le raccordement des divers fils aux éléments des faces avant et arrière est réalisé suivant les deux schémas et vérifié méticuleusement avant mise sous tension.


Quelques mesures

Les mesures sont présentées en figure 9 et 10.
La figure 9 montre les différentes pondérations disponibles. La figure 10 présente l'oscillogramme d'un signal de 10 µV à 100 Hz amplifié 1000 fois en pondération 300 Hz Lin et un signal de 50 µV en pondération A.
Le spectre couvre de 0 à 500 Hz et la référence est placée à -40 dBV. Le bruit résiduel est de -80 dBV avec l'entrée court-circuitée. Comme le gain de l'ampli est de 60 dB, cela signifie que les ronflements et influences extérieures sont inférieures à -140 dBV (0,1µV !). Le temps de montée mesuré en position "Full" est inférieur à 600 nSec.


Caractéristiques techniques de notre prototype

Liste des composants de l'amplificateur de mesure


Conclusion

Cet ampli de mesure est le maillon indispensable pour caractériser les réalisations audio. Il permet la mesure directe selon les deux normes principales: 20 kHz-Lin et A-pondéré. Son exceptionnelle sensibilité lui autorise la visualisation des signaux d'une amplitude de 10 µVpp. Il fait merveille dans la mise au point des alimentations. Enfin, en utilisant la sonde d'oscilloscope 10/1 d'impédance 10 MΩ , il se révèle capable d'extraire signaux très faibles sans perturber le circuit en test.


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Récapitulatif des photos (Haute définition)

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